Dossier
Scénario 2 : Yamauchi meurt, ses héritiers vendent.
Le fait est que nul n'est immortel, il n'est pas exclu de voir ses héritiers se désintéresser de Nintendo. Quand on a un père qui n'est jamais présent à la maison ou qui se ne s'intéresse pas à ses enfants, on se doute bien que le rapport à la société n'est pas le même que pour celui qui en a tiré les ficelles pendant des décennies.Yamauchi a une fille, Yoko, qui s'est mariée à un brillant homme d'affaires qui a, depuis, pris la direction de Nintendo of America : vous ne le saviez peut-être pas, mais Minoru Arakawa n'est autre que le gendre d'Hiroshi Yamauchi, et son amour pour Nintendo est aussi fort que celui de son beau-père. Les deux hommes n'ont par contre pas vraiment toujours eu d'excellents rapports, et dans le pire des cas on pourrait envisager un déplacement du coeur de Nintendo du Japon vers les Etats-Unis.
Car Arakawa a fait de Nintendo un géant du jeu aux USA, avec un chiffre d'affaires effrayant qui fait de la filiale américaine un monstre au sein même de Nintendo : cette position est loin d'être un inconvénient quand il s'agit d'exiger quelque chose de la maison-mère. Dans le cadre de Nintendo, il fait reconnaître qu'un déplacement des forces créatrices du Japon vers les USA pourrait avoir un impact positif sur la firme dans la mesure où, soudain, les jeux seraient plus ouverts à nos cultures. Miyamoto a-t-il envie de déménager ?
Un déplacement du siège de Big N aux USA aurait aussi des répercussions boursières, dans la mesure où la réglementation n'est pas la même aux USA, par rapport au Japon. Cela ne serait peut-être pas un avantage pour Nintendo par rapport à Microsoft, même si les formules magiques existent pour cacher certains chiffres à vos concurrents, quel que soit le pays dans lequel vous êtes basé.
Depuis, il a quitté Nintendo : après 22 ans de bons et loyaux services, il a pensé qu'il fallait tourner la page et permettre aux autres forces vives de se révéler et faire de Nintendo une société prospère et dynamique ! Tatsumi Kimishima s'occupe maintenant de Nintendo depuis janvier 2002. Après un passage par the Pokémon Company comme Directeur financier en 2001, il a été parachuté à la direction générale de NOA. Force est de reconnaître que c'est un personnage plutôt discret, qui laisse volontiers parler les autres responsables exécutifs de Nintendo comme Reggie ou Perrin !
Scénario 3 : Microsoft force la main.
Microsoft ne pourrait donc, en fait, que forcer la main de Nintendo, et pour cela plusieurs scénarios sont envisageables. On aime bien les OPA dans les milieux financiers, mais dans le cas de Nintendo, ce n'est pas vraiment possible en raison des actionnaires majoritaires de Big N : on a Yamauchi et Nintendo au premier plan. Lequel des deux pourrait être séduit par une offre publique d'achat ? Il n'y a pas assez de titres en circulation pour mettre en danger le capital de Nintendo, et ce n'est donc pas vraiment la voie à choisir.Par contre, Microsoft pourrait continuer sur sa lancée et même aller plus loin : Nintendo pourrait être affaibli si, lors des deux années qui viennent, la XBox distance largement le GameCube. De même, Nintendo serait en position de faiblesse si sa prochaine console démarrait bien mieux que celle de Nintendo. Non seulement la politique entreprise par Satoru Iwata serait remise en cause, mais en plus la valeur de Nintendo pourrait en prendre un coup !
Plus que dans tout autre secteur, les actions des entreprises du jeu vidéo sont sous pression permanente : une phrase de travers, un chiffre qui dénote, et ce sont des semaines de croissance qui disparaissent en quelques heures. Il n'y a bien qu'EA pour connaître une croissance folle, presque sans accidents notables. Nintendo a toujours eu des hauts et des bas : le discours plaît, mais la réalité est généralement un tantinet différente, et Big N s'en trouve sanctionné. Si l'action grimpe quand les prévisions de ventes sont au beau fixe, elle chute quand, par exemple, Nintendo stoppe sa production, même si ce n'est que temporaire.
Ces hauts et ses bas sont loin d'être uniques à Nintendo, mais une action faible, c'est une société faible, donc des investisseurs eux aussi faibles. Yamauchi ne serait-il alors pas tenté de vendre, préférant ne pas attendre de jours meilleurs pour profiter d'une belle retraite dorée avec 'le peu' qu'il lui resterait ?
Scénario 4 : Nintendo se consolide avec un autre.
Ce n'est pas vraiment le genre d'Hiroshi Yamauchi, on le sait (et on croise les doigts pour que cela reste ainsi !). Nintendo dispose en interne d'équipes de développement hardware qui font, on doit le reconnaître, de l'excellent travail : le récent design de la Nintendo Dual Screen n'est que le plus résent exemple de la qualité du travail accompli. C'est par contre au niveau des logiciels qu'on pourrait espérer un peu plus de la part de Nintendo, auquel on reprochera sa dévotion totale aux Mario and Co.Ce n'est pas une critique, j'aime sans doute Mario beaucoup plus que n'importe qui d'autre :), mais Mario ne suffira pas pour permettre à Nintendo de perdurer, ou de résister sur le long terme aux appétits ogres de Microsoft, l'objet de ce dossier. Nintendo doit donc chercher à se renforcer, et ce notamment au niveau du logiciel, pour élargir son offre et assurer à ses consoles de disposer d'un catalogue riche, varié, intéressant pour tous.
Nintendo devrait essayer de changer sa stratégie : arrêter de distribuer ses licenses à droite et à gauche pour maintenant leur faire développer des jeux novateurs, nouveaux, uniques, pour ses consoles en exclusivité. On sait que le public est avide de licenses, mais il y a fort à parier que les joueurs du monde seraient réceptifs à une console qui propose des jeux qu'on ne trouve nulle part ailleurs.
Le problème actuel de Nintendo repose notamment sur les styles qui sont disponibles dans son catalogue : certains diront qu'il n'y a pas assez de RPG, d'autres de jeux de course, d'autres encore de jeux de combat. Nintendo devrait donc essayer de mettre la main sur un éditeur dont les équipes pourront mettre au point ces jeux qui lui manquent tant. Si s'offrir Electronic Arts n'est pas dans le domaine du possible, ce n'est pas le cas d'autres éditeurs moins gigantesques, comme Namco ou Capcom. La relation étroite entre Capcom et Nintendo pourrait être le fer de lance d'une nouvelle alliance, pourquoi pas d'un nouveau géant, les jeux de Capcom venant compléter le catalogue de Nintendo.
On n'est pas allé bien loin dans chacun des scénarios disponibles, et il y a fort à parier qu'il y en a d'autres. Le fait que Nintendo suscite l'intérêt de ses concurrents est un signe qu'on ne se débarrasse pas de Big N comme ca : mais il n'y a pas de fumée sans feu, et les rachats d'actions (un autre a eu lieu fin août pour quelques dizaines de millions de dollars) indiquent que Nintendo se consolide pour ne pas tomber sous le joug d'un méchant américain prêt à tout pour prendre le contrôle de votre salon. La guerre des jeux vidéo est fascinante, si on veut être tranquille un bon moment, il ne nous reste plus qu'à espérer que M. Yamauchi restera en bonne santé quelques années de plus !
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