Quel rôle jouez vous dans le développement ?
Shigeru Miyamoto : Je suis un membre du conseil. Il n'y a pas longtemps, il y'a eu cette réunion d'actionnaires de Nintendo, et j'ai eu la trouille parce que j'ai du me lever et dire quelquechose. Plus sérieusement, je ne pense pas que dans ce secteur de l'entertainment, il y ait de définition précise pour répondre à "qu'est ce qu'un directeur ? Qu'est ce qu'un projet ?".
J'ai rejoins Nintendo comme designer et j'ai fait quelques petits jeux, mais au moment du succès de Space Invaders en 1979, j'ai fait un jeu du type Galaxian, et on a finit avec plein d'invendus en Amérique. Le jeu que je fis avec toutes les bornes d'arcade invendues fut Donkey Kong, et je m'occupai de tout dessiner. Une fois terminé, j'essayai d'en parler avec les autres techniciens de Nintendo, mais ces derniers avaient l'air de dire "Qu'est ce que pourrait bien faire cet étudiant aux cheveux longs ? Qui c'est ce gars ?".
La fameuse borne Donkey Kong (image issue de notre dossier consacré à l'histoire de Nintendo)
Donc vous leur avez montré ce que vous aviez fait avec Donkey Kong ?
SM : Aujourd'hui, une personne peut s'occuper de beaucoup d'aspects d'un jeu, et c'est un designer. A l'époque, il n'y avait pas de "designers" comme aujourd'hui, donc j'ai du faire la majorité du boulot tout seul !
A la fin, il y avait 6 ou 7 personnes qui m'aidaient sur Donkey Kong (software et hardware), et six autres personnes qui travaillaient sur la famicom aussi je crois. Une fois que nous avions assez travaillé avec les apprentis sur la conception initiale du jeu, nous leur avons laissé le reste du développement. Cela s'est révélé être la meilleure façon de faire des jeux. Voilà, depuis cet époque, je suis directeur.
Et depuis lors on ne vous a plus traiter de gars aux cheveux longs.
SM : Après le lancement de la Famicom, j'ai commencé à travailler sur les séquelles de Mario et Zelda. J'étais le directeur sur les deux projets, et j'ai vraiment cru que j'allais mourir. A l'époque Nintendo voulait faire des jeux dont les graphismes n'abimeraient pas les yeux des jeunes enfants, donc tous les fonds devaient être noirs. Cependant, l'industrie du jeu vidéo se portant de mieux en mieux, nous avons eu le droit faire des fonds bleu ciel dans Mario, et aussi d'augmenter la taille des personnages.
Comment un jeu est considéré comme terminé ?
SM : Vous devez vous concentrer sur l'essentiel : l'aspect fun du jeu. Cependant, le directeur à ses propres désirs : il veut mettre ceci et cela dans le jeu. Si, dans le projet, chacun veut imposer ses idées, tout peut tomber à l'eau. Quand on en arrive à ce point, je m'enflamme pendant les réunions. Les gens de Nintendo s'en rendent compte quand je tape du poing sur la table. Je ne suis pas un gentil garçon. Si j'étais un gentil garçon, je regarderai timidement les gens de l'équipe et leur demanderait "Pourquoi ne fais tu pas ça ?", mais non. Parfois, il faut montrer qui vous êtes, en vous disant "Je suis fooooooort !" (rires).
Parfois j'ai l'idée de quelquechose qui pourrait être fun pour un jeu. Alors j'en parle aux programmeurs, mais je n'ai pas de réponse claire, ni de bonne réaction. Après, quand ils me montrent ce qu'ils ont fait... ben, ce n'est pas vraiment ce à quoi je pensais. Dès lors, que devrais-je faire ? Si je n'arrive pas à faire passer le message, j'essaye de leur faire comprendre encore une fois mon idée d'une autre façon.
Actuellement, je m'occupe de 4 ou 5 titres Nintendo par an. Quant aux autres jeux, j'aide les équipes durant la finalisation du jeu, ou quand le projet déraille ou que rien ne va plus. Je travaille comme superviseur, je ne suis pas plus impliqué que ça dans le développement des jeux.
Avec une équipe étrangère comme Retro Studios, avec Metroid Prime, nous faisions une conférence téléphonique une fois par mois et échangions des employés une fois tous les deux ou trois mois.
Pouvez vous nous parler de votre inspiration ?
SM : Je ne dis jamais "je vais en faire un jeu vidéo" après avoir vu un film. Je veux aider les gens qui jouent aux jeux vidéo à devenir plus créateur, et les faire influer sur les choses. Les cinématiques, pendant lesquels le joueur reste passif, représentent une grande partie des jeux aujourd'hui. Mais je continue à penser que tant que vous ne faisez rien, vous ne jouez plus à un jeu.
Aujourd'hui, il semble qu'une formidable idée au premier abord, peu importe qui l'a eu, et peut importe sur quelle console elle se concrétise, devient toujours la même chose. La PS2, la Xbox et la Gamecube ont les mêmes capacités. A partir de là, la compétition se joue sur un plan graphique et sonore, et cela côute cher. Vous devez déjà le savoir, mais globalementles ventes de jeux diminuent.
Personnellement, je pense que c'est mieux de travailler sur ce que vous croyez être des idées stupides. Dans le même temps, il faut travailler sur des produits vendables par Nintendo ensuite. Pour être "brutalement" honnête, il n'y a aucune différence entre la PS2, la Xbox et la Gamecube. Donc où peut-on faire la différence ? Dans le software. Nintendo a la GBA, donc nous devons continuer à exploiter la liaison Gamecube/GBA.
Donc vous pensez que l'interconnection entre les deux consoles sera un succès ?
SM : Mmmmh... Qui sait ?... Moi pas ! (rires) Mais... Mmmmh... Il y a des choses dont je suis sûr qu'elles vont marcher.
Parlez nous de vos prochains jeux.
SM : Pikmin 2 va sortir cette année. Je pense que l'intérêt sera au rendez vous. Et j'ai déjà une idée claire dans mon esprit pour Pikmin 3.
Pour parler de Zelda Four Swords, les gens à l'E3 disait : "Ce n'est pas réél. Je veux utiliser des flingues !" et ainsi de suite. C'est ce que recherce actuellement le marché américain je crois.
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