Dossier
La tradition annuelle de la fin du mois de mai ne prend pas une ride : c'est la période des bilans. Celui de Nintendo est toujours riche en enseignements, car quelle que soit la teneur des communiqués de presse du service marketing, les totaux proposés dans ce rapport financier plus qu'officiel ne mentent pas.
Pour les pressés
Les bilans financiers n'intéressent en général personne. Mais dans le cas de Nintendo, on y trouve toujours des enseignements sur lesquels nous reviendrons plus loin dans cet article. Mais ceux que les chiffres effraient se réjouiront de pouvoir tout comprendre en quelques lignes, puisque c'est ce qu'on va essayer de faire ici...Précisons d'emblée que cette année encore, Nintendo a gagné de l'argent. Et pas qu'un peu : avec un revenu 515.3 milliards de Yen (soit 3.79 milliards d'Euros), son profit net atteint 87.42 milliards de Yen (soit 640 millions d'Euros). Le revenu correspond à l'argent que votre entreprise gagne : ventes de consoles et de jeux dans le cas d'une société comme Big N. Le profit net est l'argent que vous ajouterez ensuite à votre compte banque, considéré comme acquis, une fois que vous avez payé tout ce que vous deviez payer (fournisseurs, impôts...).
Si le profit net a doublé par rapport à 2003-2004, les ventes sont quant à elles restées stables. Les choses auraient été un peu différentes si Nintendo avait atteint son objectif de 6 millions de DS vendues : ce n'est pas le cas, puisque le compteur s'est arrêté à 5.2 millions de consoles.
Nintendo pense plus que doubler le nombre de DS vendues d'ici le 31 mars 2006 avec 12.4 millions de consoles vendues (et 35 millions de jeux, ce qui représente 3 fois le volume de jeux vendus en 2004-2005). Les ventes de GBA devraient baisser de 33.8%, celles de GameCube de 28.6%. Ca sent la nouvelle génération qui arrive... Heureusement que Big N a une belle part de marché de 94% sur le marché portable, la concurrence aura été sévère sur le front consoles de salon cette année et le sera encore plus d'ici la fin mars 2006 !
Dans quel monde vit-on ?
Il faut toujours placer les performances d'une entreprise dans le contexte économique dans lequel elle évolue. Pour Nintendo, c'est d'autant plus complexe que son marché est mondial, et qu'il lui faut donc tabler sur des situations parfois différentes d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre, tout en plaçant Nintendo dans son propre contexte, par rapport au marché du jeu vidéo dans son ensemble.2004-2005 n'aura pas été mauvaise : les marchés américains et européens se sont relativement améliorés avec une croissance relative mais existante, tandis qu'au Japon, le phénomène de 'dérive du joueur' s'est amplifié. Dans le monde, Nintendo indique qu'on a atteint le point de saturation au niveau des consoles actuelles, tandis que les joueurs ont dépensé leur budget jeux en suites, jeux de sport, licenses cinématographiques. Cela n'a pas empêché Nintendo de vendre 6 millions de Pokémon Rouge-Feu et Pokémon Vert-Feuille, ou de cartonner avec sa rétrospective Famicom Mini.
Pas facile, dans ce contexte, de lancer une nouvelle console. C'est pourtant ce que Nintendo a fait avec la Nintendo DS, qui s'est vendue à 5.2 millions d'unités dans le monde (les dernières prévisions faisaient état de 6 millions de machines vendues). Super Mario 64 DS est le best-seller de la DS à ce jour, avec plus d'un million de jeux vendus. Sur GameCube, Paper mario et Mario Party 6 ont eux aussi franchi cette barre fatidique du million.
Des sous à la banque
On a toujours parlé de Nintendo comme d'une entreprise saine : son compte en banque le prouve, car il est bien garni. Les succès de chacune de ses consoles lui ont toujours permis de mettre chaque année un peu plus d'argent en réserve pour des coups durs qui pourraient arriver neuf fois sans que l'existence même de Nintendo soit remise en cause !!!Nintendo a cette année procédé au rachat d'une partie de son capital. 3.6 millions d'actions Nintendo sont repassées sous le contrôle de Nintendo, une transaction étalée sur la durée mais au coût élevé : 42.9 milliards de Yen (soit 316 millions d'Euros).
Mais du cash, Nintendo en a encore : 792.7 milliards de Yen, ce qui représente quand même la bagatelle de 5.84 milliards d'Euros. Largement de quoi financer ses développements futurs : Nintendo explique quels facteurs peuvent être dangereux, des changements économiques aux changements de planning parce que le produit ne correspond plus aux attentes du public, aux conséquences des reports de lancement qui coûtent cher en part de marché.
Retour vers le futur
Acheter des actions Nintendo, c'est faire un pari : celui que la valeur de l'action s'envolera pour effectuer une plus-value confortable à la revente des actions acquises. Pour que cela se fasse, il faut que la demande soit supérieure à l'offre : combien seriez-vous prêt à payer pour une Game & Watch de 1982 ? Cher, parce que c'est rare. Or, c'est bien connu, ce qui est rare... est cher !Pour asseoir son succès futur, Nintendo va donc devoir ruser, et ce d'autant plus que la Nintendo Revolution n'apparait pas dans les prévisions 2005-2006. Cela est un signe que la console ne sortira certainement pas en avance comme certains l'espéraient encore la semaine passée.
Reste que la console est mentionnée dans une des premières pages du bilan : 'La console de prochaine génération, 'Revolution' (provisoire), est représentative d'une toute nouvelle forme de divertissement qui sera proposée à nos clients.'. On n'est pas bien avancé, mais le maque d'informations nous conforte dans l'idée que la console ne sortira pas au cours de l'exercice fiscal commencé au 1e avril.
Au 31 mars 2006, Nintendo estime pouvoir vendre pour 420 milliards de Yen (soit 3.09 milliards d'Euros) de consoles et jeux. C'est peu quand on rapporte ce chiffre à cette année : 515,2 milliards de Yen (soit 3.79 milliards d'Euros). L'année prochaine sera donc sensiblement moins bonne, mais il ne faut pas perdre de vue le fait que tant le GBA que le GameCube verront tous deux leurs ventes baisser de près d'un tiers.
Avec 66.8 millions de GBA, 18.5 millions de GameCube et 5.26 millions de DS dans le monde, Nintendo n'est pas à plaindre. Cette année fiscale 2005-2006 fut un vrai succès pour Big N, avec des jeux comme Mario Party 6 ou Paper Mario qui ont allégrement franchi le cap du million de jeux vendus. Pour 2005-2006, Nintendo pense que ses ventes de machines (hormis DS) vont baisser fortement (d'un tiers environ), signe que c'est encore une période charnière tant pour nintendo que pour l'ensemble du secteur...
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