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Tencent, Microsoft, Sony et Nintendo : quelle est leur vision de l'avenir ?
Face à l'émergence des métavers & NFT et l'effervescence du milieu, chacun doit d'ores-et-déjà préparer l'avenir. Un avenir dont la vision diverge entre Tencent, Microsoft, Sony ou encore Nintendo. Explications.
Dossier
Après avoir évoqué et expliqué récemment ce que sont les métavers, les NFT et l'impact que ces technologies pourraient avoir sur le marché du gaming et dans nos vies en général, il nous a semblé important de développer la vision des trois principaux acteurs du marché (Tencent, Sony et Microsoft) ainsi que celle de Nintendo dans un second dossier faisant suite à celui que l'on vient d'évoquer. Quels sont les projets pour l'avenir de chacun d'entre eux ? A l'heure où les visions divergent et où chacun a sa propre conception de l'avenir, on vous propose d'étudier comment tous se préparent au travers de ce dossier exclusif.
Tencent : l’empire de l’ombre
Depuis plusieurs années, notamment au cours des deux années précédentes, Tencent a réalisé de multiples investissements. Principalement, ces investissements étaient orientés sur le marché du gaming, mais en réalité ils s’avèrent être bien plus variés.A l’heure où Pékin sévit même à l’encontre de ses plus grands fleurons technologiques nationaux pour restreindre leur influence et mène une grande campagne de répression à leur encontre, Tencent cherche à contrôler les métavers, alors que le PCC met en garde contre les investissements “aveugles” dans le métavers.
Cependant, ce qu’il faut comprendre, c’est que Tencent ne vise pas à posséder ou avoir des parts dans un seul projet et ne croit pas en LE métavers mais bien LES métavers. A ce titre, l’entreprise possède par exemple 40% des parts d’Epic Games, qui souhaite mettre en œuvre son propre projet, au même titre que Roblox par exemple qui nourrit aussi cette ambition.
En Chine, le nombre de marques liées aux métavers possédées partiellement ou intégralement par Tencent sont au nombre de 20, rien que ça. C'est avec ces statistiques que l'on comprend les investissements de la firme de Shenzhen. En un mot, Tencent n’a qu’un seul objectif : dominer.
Cependant, le facteur qui pourrait bien mettre un terme aux plans de Tencent sur le sol chinois, c’est bien le gouvernement. Hostile à la technologie au gré des déclarations, les cadres du groupe pensent pourtant que le gouvernement ne s’opposera pas à de tels projets. Seule condition selon eux, que les métavers respectent les règles très strictes imposées par Pékin. Toutefois si Pékin refusait tout métavers, cela mettrait aussi en danger les principaux acteurs internationaux chinois, dont Alibaba et Baidu. Une situation qui se cumulerait avec la faillite de l'agent immobilier Evergrande.
En résumé, Tencent, si l’on pouvait en dresser le portrait, serait une araignée, qui tisse sa toile pour mieux capturer sa proie. Depuis plus d’une dizaine d'années, c’est d’ailleurs elle qui domine le marché des jeux vidéo, dans l’ombre, loin devant Microsoft et Sony, et cela n’est pas près de s’arrêter. Il est évident que les jeux vidéo joueront un rôle essentiel dans le projet de Tencent comme c’est déjà le cas depuis longtemps.
Par ailleurs, la question se pose même de savoir si le premier métavers viendrait de Chine car Tencent (et ses principaux concurrents aussi, surtout Baidu) semble assez avancé dans ses projets et dispose d’outils importants pour les mettre en œuvre, comme WeChat, QQ, les jeux vidéo et l’ensemble de ses nombreuses filiales localisées uniquement en Chine pour la plupart. Une seule chose est sûre, les transactions, particulièrement vers l’Occident, devraient être encore très nombreuses cette année et même au-delà.
Game Pass & métavers : la solution Microsoft
Avec Tencent, Microsoft a aussi dans l’optique de posséder LE (et non pas LES) métavers le plus complet qui soit. Un métavers global dans lequel on pourrait discuter, jouer, s’informer ou même encore travailler.Si l’on ne sait encore rien de la forme qu’il prendra, il n’y a qu’une seule certitude, Microsoft compte se servir de l’ensemble de ses entités, technologies et ses services actuels (Office, Linkedin, Bing, Azure, Hololens, Windows, Xbox…).
C’est une vision différente de celle de Meta et son café virtuel ou d’autres qui misent tout sur le divertissement (Epic, MiHoYo, Disney...). Étant donné que nous avons déjà réalisé un dossier sur le sujet, on vous invite à le lire car nous ne développerons pas davantage cet aspect ici, surtout que les éléments dont nous disposons sont encore assez vagues.
Dans le marché du gaming, Microsoft est enfin parvenu, grâce au rachat d’Activision-Blizzard (positionné auparavant au 5e rang des acteurs de l’industrie selon leur taille et le chiffre d’affaires), de dépasser Apple, relégué au 4e rang, et se rapproche de plus en plus de Sony. Pourtant, l’optique n’est pas de relancer une concurrence hardware avec l’éditeur japonais mais bien lui drainer son influence.
Le rachat d’Activision-Blizzard est un acte très fort en ce sens, car les franchises Activision ont toujours été très liées à l’image de PlayStation (Spyro, Crash Bandicoot, Call of Duty) et s’il est évident que la plupart de ces franchises resteront sur la plateforme de Sony (comme c’est le cas avec Minecraft par exemple), elles sont aussi un atout important de la stratégie de Microsoft et du Game Pass.
Tout d’abord pour les objectifs de Microsoft, ils sont multiples car c’est bien une “guerre d’influence” qui prend forme. Avec ce rachat, l’influence de Microsoft dans de nombreux domaines comme l'eSport, le gaming mobile & PC, le développement des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle ou encore du métavers… Là aussi, nous avons déjà réalisé un dossier sur cette opération historique aux conséquences multiples.
Concernant le Game Pass, il est évident que le service d’abonnement est aujourd’hui la pierre angulaire de la stratégie de Microsoft dans le gaming et celui-ci bénéficiera d’un catalogue d’une part encore plus large, et d’autre part encore plus concurentiel qu'il ne l'est déjà. Aujourd'hui, l'offre de Microsoft n'a aucun concurrent mais à l'avenir si un autre acteur cherchait à se positionner, il lui sera encore plus difficile de faire concurrence au Game Pass et ses licences de renom.
Nous ne sommes donc pas à l’abri d’autres rachats et d’investissements massifs à l’avenir par Microsoft. Cependant, dans un avenir proche cela n’est pas envisageable car la firme de Redmond devra d’abord valider son opération face à des instances gouvernementales réticentes et c’est là que réside le plus grand défi de Microsoft.
A moins de ce fait que l’opération échoue sur ce point, il ne faut pas s’attendre à un autre rachat avant 2024 au mieux (et encore !). Seule scénario qui viendrait s'opposer à celui-ci : dans le cadre d'un refut de la fusion par les instances américaines, un rachat d'un autre acteur tier (Ubisoft nous semble le plus probable) ou de certaines entités d'ABK seraient à prévoir.
Sony et PlayStation : ensemble, c’est mieux !
Sur les 4 entreprises de ce dossier, celle qui est moins expressive sur sa vision à long terme, c’est bien Sony. En effet, si nous disposons de nombreuses pistes, la firme de Tokyo est assez réservée et il nous faut concocter avec des rumeurs et quelques fins éléments pour comprendre son projet qui ne repose que sur le matériel actuel et ne s’attribue pas d’ambitions démesurées.Par ailleurs, c’est un projet qui se situe à la fois entre celui de Nintendo, que nous allons évoquer dans la partie suivante, et celui de Microsoft. Dans les faits, PlayStation ne change pas de ligne directrice en continuant ses activités traditionnelles (consoles, jeux exclusifs, VR, etc…) et est utilisé pour permettre de (re)développer d'autres filières de Sony filières comme le cinéma.
Sony Pictures se trouve être au cœur de la stratégie du groupe. Dernièrement, Sony Pictures s’est relevé après quelques années difficiles, avec le succès des derniers Spider-Man avec Tom Holland. Parallèlement, le tournage de films et séries issus du giron de PlayStation à l’instar d’Uncharted pour ne citer que lui aide encore plus la filiale de produire des blockbusters au succès quasiment assuré.
UNCHARTED - BANDE-ANNONCE OFFICIELLE
Côté PlayStation, la filière mène elle aussi cette fameuse “guerre d’influence” par ses propres moyens. Que ce soit avec les partenariats multiples réalisés avec des tiers pour qu’ils fassent la promotion de la PS5 dans leur trailer ou qu’ils produisent des vêtements et produits dérivés à l'effigie de la marque. Ce n’est pas nouveau, loin de là, mais Sony continue de capitaliser fortement sur son image de marque. Une image très forte, notamment auprès des jeunes que Sony cherche (et a toujours cherché) à fidéliser.
De ce fait, Sony avec PlayStation continue de miser sur une stratégie de vente qui a déjà porté ses fruits et porte toujours ses fruits. Toutefois cela ne l’empêche pas d’innover. L’éditeur se tourne ainsi aussi vers le PC et porte ses plus grandes licences après 3 ans de commercialisation en moyenne (God of War, Horizon…) sur leur console.
Par ailleurs, les rumeurs sont de plus en plus nombreuses autour du projet “Spartacus”. Un service d’abonnement qui viendrait fusionner ce que PlayStation propose déjà avec le PS Now et le PS Plus, le tout dans une seule offre. Néanmoins si cela pourrait arriver dans un avenir proche, rien n’est officiel.
A l’avenir, Sony devrait ainsi continuer à faire ce que le groupe sait faire de mieux aujourd’hui. Quant aux nombreux rachats effectués par Sony au cours de l’année dernière, on peut s’attendre à ce qu’ils soient encore plus nombreux en 2022 et le groupe a déjà démarré fort avec Bungie. Une théorie folle voudrait même qu’en réaction au rachat d’Activision, Sony s’offre Ubisoft. Une opération tout à fait réalisable, surtout qu’Ubisoft s’est dit ouvert à toute proposition et que Sony possède les moyens de s'offrir Ubisoft. De fait, si nous ne sommes pas favorables à ce scénario, nous ne le rejetons pas de la table pour autant.
Nintendo et sa vision à contre-courant
Tout comme Sony mais d’une manière encore plus prononcée, Nintendo n’a qu’une seule stratégie : continuer comme ils ont toujours fait. Au cours de son histoire, Nintendo a toujours été à contre-courant, ne cherchant pas l’innovation graphique et technique mais plutôt à innover et réinventer notre façon de jouer et de consommer.Que ce soit la Wii avec le motion gaming, la DS avec son double écran ou plus récemment la Switch et sa polyvalence, Nintendo a toujours privilégié l’innovation et la société ne compte pas s’arrêter en si bon chemin alors que ses jeux et consoles ne se sont presque jamais aussi bien vendus.
Par ailleurs, Shuntaro Furukawa est souvent questionné sur ces sujets et continue d’affirmer que la famille Switch n’en est qu’à la moitié de son cycle de vie. Plus récemment, il a aussi indiqué que l’entreprise n’était pas favorable aux rachats de masse et qu’il surveillait le développement de certaines technologies (Cloud gaming, NFT, métavers) sans pour autant vouloir les développer.
Avant tout, Nintendo continue de rester fidèle à sa philosophie et sa ligne directrice. Cependant, la firme de Kyoto commence aussi à s’ouvrir de plus en plus pour exporter ses propriétés intellectuelles sur d’autres médias et supports ou avec d’autres éditeurs. La série Mario + The Lapin Crétins en est l’exemple : Nintendo s’ouvre aux autres, mais cela ne veut pas dire que toutes les portes sont ouvertes et les opportunités restent rares et ponctuelles.
De plus, la société cherche à étendre la portée de ses propriétés intellectuelles et à cette fin les accords conclus avec Universal Studios pour la création d’un parc à thème et d’un film sur la série Super Mario illustrent cette volonté, au même titre que les LEGO Super Mario et bien d’autres. Depuis 2019, Nintendo a aussi ouvert un magasin spécialisé dans la vente de produits dérivés officiels à Tokyo et deux autres éphémères dans plusieurs métropoles japonaises.
A l’avenir on peut de fait s’attendre à ce que Nintendo ait un usage plus large de ses propriétés intellectuelles afin de toucher un public d’autant plus large. Concernant les activités de la société dans le gaming, les équipes de Big N continueront de faire ce que l’entreprise a toujours fait de mieux : innover.
Nous l'avons vu, chacun a sa propre vision des choses. Une vision qui reste influencée par la situation de chacun dans le marché vidéoludique et au-delà. Une situation qui explique les stratégies de Nintendo et Sony très conservatrices, au même titre que cette situation explique aussi les investissements et les ambitions de Tencent et Microsoft. Tencent et Microsoft qui ont tout à gagner avec leurs investissements, mais peuvent aussi perdre beaucoup si les métavers ne parviennent pas à prendre forme.
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