A trop vouloir proposer un titre mi-onirique, surréaliste et d’une grande froideur visuelle pour simuler un quotidien morne et sans intérêt, on passe peut-être à côté du principal : l’accroche du public qui va y jouer. C’est un peu la sensation que l’on obtient après avoir joué à Mosaic. Un jeu de niche qui ne nous donne pas réellement l’occasion de nous amuser, l’étrangeté de son propos étonne mais finalement déçoit surtout.
Un jour sans fin....
Chaque jour, notre personnage doit se lever et se réveiller en se giflant pour se donner un peu de courage, se brosser les dents dans sa salle de bain et se rendre à son bureau, au sein de la méga-corporation Mosaic qui développe des applications pour smartphones ainsi que des systèmes connectés que nous croiserons régulièrement dans notre vagabondage quotidien. Une situation invariable, monotone et totalement assumée.
Toujours habillé de la même manière, avec sa chemise blanche, son pantalon noir et sa cravate à resserrer, notre célibataire peut prendre connaissance chaque matin de quelques nouvelles sur son smartphone, des messages cyniques qui rappellent notre quotidien : engueulade du boulot, erreur de destinataire, pub, bref rien pour nous mettre en joie. Il y a bien un peu de détente comme une appli BlipBlop pour gagner des points, une reprise d’un titre existant réellement sur smartphone.
Votre serviteur n'en avait jamais entendu parler avant de recevoir le jeu. C'est une appli qui ne sert à rien, une transposition critique de jeux inutiles : vous cliquez le plus vite possible sur le bouton blip au centre de l'écran pour remporter le maximum de blops, en franchissant les niveaux et en atteignant les scores vertigineux en millions ou milliards de blops, si vous n'avez pas mal à votre doigt avant. Il n'y a rien à gagner, hormis un mode prestige au niveau 100 qui réinitialise vos améliorations et vous fait tourner dans une boucle sans fin. On reste amusé par la réflexion qui a poussé à créer ce jeu quelques semaines avant la sortie de Mosaïc, mais au final, quel intérêt ? Après avoir cliqué au départ sans comprendre le principe du jeu et en se demandant ce que l'on pouvait gagner, votre serviteur a vite mis de côté le jeu passé le level 10 une fois qu'il est tombé sur la
fiche explicative sur le net.
Notre exclu social se regarde dans la glace, se peigne, et reçoit des messages surréalistes d’un poisson rouge, que l’on peut mettre dans sa poche ou balancer à la poubelle. Le frigo reste désespérément vide (on ne le verra pas faire ses courses), les factures s’accumulent (une appli permet de payer en ligne) et on sort de son appartement pour se diriger vers son travail, en tentant une nouvelle fois de ne pas arriver en retard, sous peine d’être mis à la porte.
Un ascenseur où l’on croise toujours les mêmes personnes qui nous ignorent et pendant lequel on peut jouer à l'appli BliBlop pour faire passer le temps, une file interminable de boites aux lettres avec la nôtre et des courriers factures que l’on ne prendra jamais au final et on sort à l’extérieur.
Chaque jour sera l’occasion de voir un peu plus de ce trajet, avec à chaque fois un élément surréaliste montrant le côté oppressant de ce monde (comme le passage où vous êtes miniaturisé à zigzaguer entre les pas géants de vos contemporains, jusqu’à vous faire écraser sous une chaussure), ou ce besoin de s’évader (une fenêtre qui vous ouvre vers la lumière, un papillon jaune qui dénote dans cet univers entièrement constitué de camaïeu de gris que l’on va diriger un temps jusqu’à ce qu’il se fasse aspirer, un parc coloré dissimulé où la musique d’un saxophoniste vous transporte un temps dans un univers dystopique).
Quelques appli pour passer le temps mais en voulant nous faire réfléchir avec sa critique haut perchée, le soft ne propose que vacuité d'actions.
Mosaic est imaginatif mais on reste prisonnier de l'énorme linéarité du titre. On reste spectateur devant l’état de déprime du personnage, les rares choix de dialogues n’apportent pas de modification au gameplay, pas d’embranchement alternatif dans l’histoire, vous faites juste avancer votre personnage et observez ce qui lui arrive.
Bref, le titre plombe son gameplay en devenant peu à peu ultra monotone et sans avoir la moindre proposition de rejouabilité. Une pilule dure à avaler au regard du tarif de 17,99 € demandé, le jeu s’achevant en moins de quatre heures (et encore nous avons pris notre temps).
Le temps de travail de votre personnage est représenté par un mini-jeu où vous devez expédiez des ressources en partant d’un centre d’extraction vers un objectif situé en hauteur, chaque jour représentant quelques variations comme un obstacle à contourner ou un virus rouge à isoler. Intéressant à la base car c'est une des rares occasions du jeu d'être réellement actif, le principe ultra répétitif et peu attrayant visuellement ne donne guère envie de prolonger très longtemps l’expérience.
Certes, cette phase est censée représenter le travail guère passionnant de notre bonhomme, mais lorsque l’ensemble du jeu se dilue dans une monotonie extrême et des mouvements lents, quelque chose finit par clocher. On veut dénoncer le travail répétitif et pourtant c'est l'une des phases les plus attrayantes du jeu. Le gameplay du jeu propose le contraire de ce qu'il veut dénoncer. Est-ce réellement un jeu ou un simple film d’animation reprenant le principe du jour de la marmotte dans une ville déshumanisée? Quelles sont les attentes des développeurs ?
En voulant critiquer les excès de notre monde actuel ultra-connecté techniquement mais vide au niveau relationnel, Mosaïc se loupe grandement. Nous n'aurons aucune empathie pour notre personnage, on subit la répétition des scènes qui prennent toujours beaucoup de temps, on se demande quand le jeu va nous proposer réellement d’agir. Va-t-on arriver à un Burn-Out du personnage, un pétage de plomb lui donnant envie de tout casser ? Au final, quand le rideau de fin arrive, on se demande à quoi bon ce jeu ?
Bugs techniques et un environnement sonore tout aussi minimaliste
Si le titre a le bon goût d’être entièrement traduit en français dans le texte, il reste avare au niveau sonore. Pas de dialogue parlé, quelques bulles seulement et les messages textuels sur son téléphone. La musique d’ambiance est très légère, on est vraiment dans un spleen et rien ne viendra enjoliver votre expérience de jeu.
On ne s’est pas trop quoi faire, on déplace notre personnage (l’écran tactile est fonctionnel, logique car le titre existe sur mobile) et parfois on reste bloqué, en cherchant ce qu’il faut animer pour poursuivre le mouvement. Ainsi dans le parc, il a fallu tapoter plusieurs fois tactilement l’écran avant de parvenir à bouger très lentement pour s’extirper de cet environnement. Même constat un autre moment pour sortir du métro. On s’est posé des questions si nous avions loupé une action ou si c’était un bug. Dommage car la direction artistique nous a séduits à plusieurs reprises.
Nous remercions l'éditeur pour nous avoir fait parvenir un code nous permettant d'effectuer ce test. Mosaic est disponible uniquement sur l'eShop depuis le 23 janvier 2020, au tarif de 17,99 €, il nécessite 1914 Mo d'espace mémoire pour s'installer. Support de onze langues, de la manette pro, le titre est PEGI 12. Le titre a été développé par le studio Krillbite Studio et est édité par Raw Fury.
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