Une réalisation spectaculaire
Mon dieu, s’il ne fallait dire qu’une chose sur King Kong (le jeu), c’est qu’il est diablement prenant. Rarement on se sera autant senti dans la peau du héros, en l’occurrence Jack.La réalisation – bluffante – y est clairement pour quelque chose. Il n’y a pas que la version Xbox 360 qui peut se targuer d’afficher des graphismes magnifiques. Pour tout dire, sur Gamecube, on n’avait plus vu aussi réaliste depuis Resident Evil 4, LA référence en la matière. La jungle – principal décor de l’action – est fort bien retranscrite, tant par son immensité que par l’étouffement qu’elle confère bien souvent… Certes, l’environnement ne varie pas fréquemment, mais il en est finalement de même dans le film, et on peut applaudir les efforts de Ubisoft qui a tout de même essayé de faire varier les phases de jeux, avec par exemple une descente de torrents en radeau, et surtout avec les niveaux dans lesquels on incarne King Kong.
Le gros ‘plus’ du jeu reste quand même la représentation magistrale des dinosaures. In-cro-yable. Lorsque l’on voit débarquer pour la première fois le T-Rex, on hallucine littéralement. La bête est immense, et criante de réalisme : elle se déplace de manière ultra-convaincante, et vous assène de coups de crocs qui vont font sursauter. Même ses cris, qui ‘déforment’ l’écran, sont retranscrits avec brio. Certes, ces créatures avaient l’intelligence d’un castor à l’époque préhistorique, mais il faut bien reconnaître que l’IA a été développée. Ainsi, lorsque vos compagnons d’infortune vous supplient de ‘’divertir’’ la bête pendant qu’ils essaient désespérément d’ouvrir une porte de bois, vous avez une alternative : soit vous attaquez à l’aide d’une lance la bête, et jouez alors au chat et à la souris avec elle (vos chances sont assez minimes), soit vous tuez l’un de ces reptiles volants, et le T-Rex en fera joyeusement son quatre heures, ce qui vous laissera un peu de répit pour souffler, Jack ou vous ! En effet, lorsque Jack se met à courir, lorsque il subit une blessure, ou lorsqu’il vit une expérience stressante, son rythme respiratoire s’accélère, et bien souvent le vôtre en fait de même.
Enfin, savez-vous à quoi l’on distingue un très bon jeu d’un jeu simplement réussi ? Les détails, qui portent mal leur nom car ils sont bien souvent les derniers échelons permettant d’atteindre l’immersion totale du joueur. Ainsi, il convient de noter que le développeur a fait des efforts remarquables sur la modélisation des visages, sur la texture de la peau des dinos, ou sur les voix des personnages…
Incarner Kong
Peter Jackson avait ses prérogatives. Déçu par les jeux issus de sa dernière production, la trilogie Le Seigneur des Anneaux (adaptation signée EA), le réalisateur du film a exigé mieux avec King Kong et a donc voulu céder les droits d’adaptation au développeur d’un jeu qu’il avait adoré : Beyond Good And Evil. Cocorico ! BG&E est l’œuvre de Michel Ancel, le petit génie du français Ubisoft. Du coup, on murmure que les droits de King Kong n’aurait coûté que la modeste somme de 5 millions d’euros à Ubi, moyennant quoi le développeur s’engageait à développer un hit, et à prendre en compte les demandes de Peter Jackson. Parmi ces dernières, le réalisateur a insisté pour que le joueur puisse contrôler non seulement Jack (Adrien Brodi dans le film), mais aussi King Kong lui-même.On n’avait plus contrôlé le gorille géant depuis Rampage sur N64, et le résultat, certes défoulant, n’était pas à la hauteur. Dans King Kong The Official Game of the Movie, les phases de jeux avec Kong sont loin d’être un simple bonus bâclé par les développeurs. Qu’il est plaisant de mettre une monumentale raclée à ces satanées raptors qui vous rendent la vie impossible à taille humaine. Cette fois, Kong envoie les reptiles volants valdinguer comme de vulgaires moustiques. « Enfin ! » exulte-t-on alors. De même, l’immense T-Rex est désormais un monstre de votre taille. La bête n’est plus invincible, mais elle n’est pas facile à battre pour autant, et cela donne lieu à des combats titanesques, dans lesquels Kong peut passer en mode furie et flanquer des coups spectaculaires au dino. Magistral, puisqu’on vous le dit !
Toujours au rang des caprices de Jackson (et on les lui pardonne puisqu’ils sont bénéfiques), l’homme a exigé que deux fins existent pour le jeu : après avoir fini le jeu, une autre fin est débloquée et il est possible de rejouer pour, cette fois, sauver le gorille ! Le jeu a donc cette liberté que l’on ne peut retrouver dans le film (une seule fin bien sûr). Cette liberté se retrouve d’ailleurs tout le temps : Ubisoft a voulu conférer l’impression au joueur d’être l’acteur du film. Comme se plait à le dire Michel Ancel (interviewé dans Libé), « on retrouve le cadre du film, mais avec une vraie liberté ». Pour renforcer cela, tous les aspects traditionnels d’un jeu vidéo ont été radiés : comme dans le film, l’écran ne comporte aucune indication. Oubliez donc barres de vie, munitions, radar, ou carte du niveau. De même, n’espérez pas transportez 36 armes à la fois. Jack ne peut en porter que deux : une seule arme à feu, et une lance. Et les armes à feu sont ni plus ni moins celles du film : pistolet, sniper, fusil… pas beaucoup plus ! Dans tous les cas, c’est bien souvent la lance qui s’avère la plus efficace. Par exemple, il vous faudra au moins 5 coups de feu pour en finir avec un scorpion, là où une bonne lance enfoncée en viendra à bout en un instant. Clairement, si vous comptiez tout dévaster à la Turok, passez votre chemin !
Perfect ?
C’est un fait : depuis quelques années, Ubisoft n’en finit plus de nous étonner. Le Français est devenu à nos yeux l’un des trois meilleurs développeurs mondiaux (pas loin de Nintendo). Avec King Kong, l’exploit de faire d’un jeu à licence un méga-hit a été réalisé avec brio, et c’est tellement rare que cela mérite d’être cité. Pourtant, il manque souvent aux jeux de Ubi le petit quelque chose qui en ferait des œuvres légendaires, à placer au panthéon du jeu : la durée de vie. Les productions Ubisoft sont denses, ultra réussies, fun, défoulantes, mais trop courtes. Ce regret est légitime : on aimerait tant prolonger le plaisir. Ce King Kong n’échappe pas à la règle : vous en viendrez à bout en une quinzaine d’heures. Mais aujourd’hui, la tendance n’est plus aux jeux ultra longs, et soyons clairs : mieux vaut faire splendide et court que moyen et long, vous en conviendrez !Toutefois, là où l’on peut être davantage sévère, c’est au sujet des phases de jeu en ville. Ce qui devait être le clou du spectacle déçoit sensiblement. Nous l’avions immédiatement noté lorsque Ubi nous avait présenté brièvement le niveau en ville : les angles de caméra étaient très douteux. Confirmation : les développeurs ont peut-être voulu faire compliquer en multipliant les points de vue. Mais plus vraisemblablement, cette dernière partie du jeu a reçu moins d’attention pour respecter les délais imposés par la sortie imminente du film.
Mais ne chipotons pas, dans la globalité, King Kong mérite le détour, et on y reviendra, même une fois le jeu fini, pour revivre ces scènes mémorables, que ce soient les affrontements de Jack contre le T-Rex, son passage dans un troupeau de brontosaures, ou le combat titanesque de Kong contre trois Tyrannosaures… Ou tout simplement pour revivre ses nombreuses déambulations stressantes dans les ravins et hautes herbes, à entendre au loin des cris aigus de ptérodactyles ayant probablement flairé votre approche.
Cet article vous a intéressé ? Vous souhaitez réagir, engager une discussion ? Ecrivez simplement un commentaire.