Un avis de naissance... compliqué !
La star du basket Shaquille O’Neal trainait depuis de nombreuses années derrière lui sa participation à un beat’em up plus que raté, ayant sévi sur Megadrive et SNES : Shaq Fu. On était très loin des tops de la catégorie à l’époque, alors au regard de ce qui se fait aujourd’hui, ce n’était même pas la peine d’avoir envie de relancer la machine. Pourtant, la nouvelle totalement inattendue d’un remaster de ce titre en 2014 par le studio Big Deez Productions a séduit le public qui a donné le quitus pour valider la campagne Indiegogo. Son portage a été annoncé dans les premiers mois de lancement de la Switch.
Comme il correspondait à un titre cadeau gratuit pour s’excuser des désagréments d’un jeu de basket à la finition posant problème, on était très partagé à l’époque de cette annonce : étron version 2 le retour ou bien l’envie de faire d’une pierre deux coups, à savoir réparer les bévues du jeu de basket qui avait entaché la côte d’amour du studio de l’époque et en profiter pour laver l’affront d’un mauvais jeu de combat en lui proposant une nouvelle chance qualitativement bien supérieure. Shaquille O’Neal de nouveau impliqué, on pouvait tout de même logiquement se dire qu’il n’allait pas accepter de paraître deux fois dans un titre médiocre.
Lancement du jeu
Graphiquement, sans être Byzance, c’est tout à fait correct. On profite de petites cinématiques cartoon avec quelques dialogues humoristiques, le jeu reprend les conventions du très classique défilement des personnages sur la droite, la prise en main est bonne et immédiate. Trois réglages de difficulté pour se lancer dans l'action. Pas de multitudes de possibilités côté technique (les amateurs du genre resteront sur leur faim) mais un titre suffisamment amusant et ouvert pour devenir un titre d’initiation du genre.
Rien de révolutionnaire donc mais la qualité est tout de même présente. Le titre est peu coûteux (hormis les joueurs qui le reçoivent en bonus de dédommagement, le jeu est vendu à prix réduit pour les autres joueurs), une édition physique est même proposée, que l’on a vu plusieurs fois sous les 10 €, soldée.
Du n’importe nawak décomplexé
Recueilli enfant, flottant dans un sac à la surface d’un fleuve, le petit Shaq Fu fut élevé par une jeune chinoise puis confié à Ye-Ye, un maître d’art martial, pour en tirer le meilleur de lui-même (au départ, le personnage semble plus proche du niveau Kung-Fu Panda niveau maitrise et maladresse, faisant un peu tâche avec sa grande taille de plus de 2 mètres et se posant des questions sur ses origines).
Alors que vous terminez votre entraînement, le village de Shaq Fu se fait attaquer par un groupe sectaire adorateur du dieu de la mort Yen-Lo-Wang, qui s’en prend directement à votre pauvre maître. Shaq Fu se lance dans une quête pour aller corriger tout le monde un peu partout dans le monde et ramener la paix dans la région.
Avec une histoire aussi peu crédible, on est clairement dans le registre de la parodie et c’est ainsi qu’il faut apprécier le jeu, qui tente un politiquement incorrect pas toujours bien maîtrisé. Court (un peu trop malheureusement), il propose un gameplay soigné mais à l’humour décalé.
On apprécie que toute l’animation reste fluide, nous permettant d’enchainer les combos avec la touche de finish, en slow motion. Shaq Fu, malgré sa carrure, reste un novice et va donc améliorer son niveau en cours de partie. Attention cependant, le jeu ne vous prendra pas la tête à répartir des points de compétences dans un arbre pour améliorer des caractéristiques particulières, ici tout est converti automatiquement en puissance améliorée.
Le jeu reste totalement arcade, avec coup de pied, coup de poing, coup plongeant et la possibilité d'effectuer de grands sauts, des attaques spéciales comme l'invocation d'une chaussure géante pour tout balayer autour de vous dès que vous avez enchainé plusieurs coups basiques, et n’a pour but que de vous permettre de vous défouler un petit moment, trois heures trente étant le grand maximum.
Parmi les autres coups sortant de l'ordinaire, nous avons une sorte de claque Smash qui crée des dégâts autour de vous quand vous frappez le sol (il faut charger de l'énergie en frappant vos adversaires), et le Shaq Smash qui permet de foncer sur les adversaires ou de les éviter plus rapidement. A noter qu'à deux reprises, Shaq va se costumer pour avancer dans sa quête : en armure mecha et en costume de cactus. On continue ainsi clairement dans l'absurde.
A noter que la technique reste faillible au niveau de la gestion des collisions.
Un petit côté cheap malgré tout et aux propos très limites parfois.
Si la durée de vie du titre est bien courte, avec six niveaux ( de 30 minutes) et sept boss, il est dommage de ne pas avoir profité de ce contenu réduit pour au moins nous apporter un peu de variété dans nos adversaires. C’est le principal grief, on a juste à combattre des guerriers humains piochant dans les clichés des titres de combats et des démons pas franchement très malins, même si certains attaqueront à distance et que d'autres pourront bloquer certaines attaques de Shaquille.
Tous les poncifs du genre sont de sortie, avec du mafieux italien, de l'afro-américain, du ninja, du punk, des dominatrices, et même du nazis. Bref, alors qu’on aurait pu espérer des adversaires dans la veine de Dynastie Warriors dans certains niveaux, on a plutôt des transfuges de Double Dragon passant des vacances en Chine. Les développeurs ont cependant eu la main lourde au niveau du flot ennemi qui vous attaque : beaucoup trop too much, on est parfois bien content de finir un niveau.
L'humour potache qui fait régulièrement sourire, même si l'ensemble est amené avec la subtilité d'un bulldozer, et les invectives de Shaquille, parfois apostrophant directement les développeurs, ne parviennent pas à masquer le gameplay très old school et réduit du titre. Bon point cependant, si le principe du jeu est assez répétitif, on peut ramasser certains objets du décor pour varier les moyens de douleur sur les adversaires. Et les petits clins d'oeil en référence à la culture populaire sont amusants à dénicher.
Pourtant, il y a certains aspects qui fâchent : à force de s'amuser de tout, le titre est plus que limite sur certaines provocations racistes. Le titre ayant quelques années d'existences aujourd'hui, il faut replacer cela dans un contexte provocateur de l'époque, mais aujourd'hui, il serait difficile d'éditer un titre de ce genre se permettant parfois de telles lignes de dialogue. A garder donc dans un coin de la tête, le titre n'est clairement pas à laisser trainer devant les plus jeunes.
Graphismes et musiques de bons niveaux
L’envergure du remake reste mesurée mais au moins, graphiquement, c’est assez fun. Les décors nous emportent de la Chine rurale aux États-Unis, on passe sur une île paradisiaque et on achève notre périple dans les enfers/ Mention spéciale aux cinématiques 2D réalisée à la manière de comics américains, touche manga et dessins plus traditionnels chinois.
Cela donne un côté agréable à voir, coloré, amusant, avec des ennemis volant dans le décor ou s'écrasant sur l'écran de votre console, avec le rendu d'un impact sur votre verre. Et cerise sur le gâteau, aucun reproche du côté de l’animation.
Musicalement, c’est une bonne surprise, très Hip Hop Rap, qui renforce ce ton totalement décalé du jeu. Que l’on apprécie ou non ce genre de musique, l’ambiance produite est résolument fun et le thème principal du jeu, composé spécialement pour le jeu, est réussi. On ajoute quelques voix en anglais potables et des dialogues quasiment tous sous-titrés en français avec de nombreux sous-entendus, et on obtient une recette finale qui prend assez bien.
Bref, pour un cadeau, c’est franchement sympa, et si on l’achète, en promo, il vous proposera un agréable petit moment où vous pourrez jouer en laissant vos neurones au repos. Par contre, si vous venez de faire un Street of Rage 4, passez votre chemin. Ce titre technique ne vole pas du tout dans les mêmes sphères, mais ce n’était pas l’intention du studio.
On aurait aimé que le titre permette un petit gameplay coop à deux sympa, mais hélas, on reste face au service minimum. Une fois que vous aurez affronté le flot ennemi et passé l'ensemble des niveaux, peu de chance de vous voir le relancer à l'avenir, à moins que cela soit comme pour nous, en effectuant un petit nettoyage de carte mémoire. Son côté décomplexé aurait pu cependant en faire un bon candidat pour une petite soirée entre deux pizzas.
A noter la disponibilité d'un DLC gratuit, Barack Fu : The Adventure of Dirty Barry, encore plus irrévérencieux. Croisement de Barrack Obama et d'Inspecteur Harry, cette nouvelle aventure dérouille fort, y compris Marine Le Pen. Mais il fallait posséder la version physique du jeu pour récupérer ensuite le DLC, pendant une durée limitée, car impossible pour nous, avec notre version dématérialisée, d'obtenir ce précieux DLC. Un petit tour cependant sur le site de wiredrewards.com permet de l'obtenir gratuitement au moins en version PC. Un petit fichier de 25,3 Mo à télécharger, une fois que vous aurez créé votre compte gratuitement.
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