Test de Call of Cthulhu : friture sur la ligne ?
Sorti en 2018 sur PC, Xbox One et PS4, le jeu de Cyanide débarque le 8 octobre sur Switch. Faudra-t-il répondre à l'appel des profondeurs ?
TestL'homme est convaincu d'une part que les conclusions de l'enquête de Police sont erronées mais également que Pierce est la seule personne à pouvoir enquêter, pour un motif que l'on gardera secret. Vous voilà donc embarqué dans une enquête qui va vite vous dépasser, surtout si vous décidez d'embrasser pleinement la folie qui s'y mêle.
Une histoire bien narrée mais mal jouée
Call of Cthulhu se présente sous la forme d'un jeu d'enquêtes à la première personne avec des composantes RPG. Ainsi, vous serez régulièrement confronté à des choix cruciaux, et cela se présentera à vous dès les premières secondes de jeu. D'emblée, le titre pose son ambiance et accroche grâce à son univers sombre à l'esthétique Lovecraftienne particulièrement bien retranscrite. Cependant, le titre reste avant tout narratif, et n'espérez pas y croiser beaucoup d'action. Cela n'est pas forcément un mal pour un jeu d'enquêtes et cela permet d'installer une ambiance pesante bien plus facilement.Mais c'est là que vont commencer les problèmes avec le titre de Cyanide, car sa partie enquête n'est pas bien intéressante non plus. Le jeu encourage le joueur à fouiller au maximum son environnement pour d'une part récolter un maximum d'indices, et d'autre part glaner des points de compétences permettant de remplir l'arbre de compétences de Pierce, composante de jeu sur laquelle nous reviendrons un peu plus tard.
Revenons à la partie enquête, qui bien souvent se résumera à cliquer sur tous les points blancs qui s'afficheront à l'écran de façon un peu machinale. Une fois tous ces points examinés, d'autres viendront s'ajouter à l'écran et ainsi de suite. Il est rarement nécessaire de prêter attention à ce que l'on examine, où même de lire les documents que l'on trouve, car cela n'aura pas d'impact sur l'exploration. Le jeu se montre ainsi extrêmement dirigiste, et vous ne pourrez progresser que si vous êtes tombé sur l'élément nécessaire qui débloque la suite du scénario.
Il y a bien quelques puzzles ou énigmes dans le titre, mais en 7 heures de jeu, on n'en dénombre pas plus de cinq, et d'une simplicité plutôt déconcertante pour un titre du genre. Il y a néanmoins un certain plaisir à mener ses phases de recherches d'indices car elles permettent de débloquer des dialogues supplémentaires lors des conversations.
Cela sera parfois plutôt anodin et n'aura pas de réel impact sur la progression, tout au plus sur le moyen d'y arriver, tandis que d'autres choix auront eux un réel impact sur le dénouement de l'histoire. Malgré tout, on a plus l'impression d'enchaîner les parties d'objets cachés que de mener une véritable enquête, la faute à un système qui débloque automatiquement les choses sans laisser le soin au joueur de mener son analyse par lui-même.
Il clique, il clique, et il y est
Le jeu prend donc très rapidement des airs de film interactif plutôt que de véritable jeu, au point que certains chapitres ne vous demanderont de ne rien faire d'autre que d'avancer dans les décors, parler aux quelques protagonistes que vous croiserez et de passer à la séquence suivante. Extrêmement frustrant, d'autant qu'hormis son intrigue plutôt bien ficelée et donc forcément accrocheuse, on a souvent l'impression de ne rien faire, si ce n'est suivre le chemin décidé par les développeurs.Il y a cependant quelques scènes qui tentent de ressembler davantage à du jeu vidéo. On n'en spoilera pas leur contenu, mais ces scènes essaient de proposer un petit quelque chose de différent à chaque fois. Si l'intention est louable, elles s’intègrent plutôt mal au reste du jeu, et semblent avoir été développées à part et rentrées tant bien que mal dans le titre. Elles sont donc majoritairement ratées, et se révèlent souvent plus frustrantes qu'autre chose.
L'autre aspect réellement jeu vidéo du titre tient dans son arbre de compétences qui permet de développer 7 caractéristiques chez notre détective : son éloquence, sa force, sa capacité à trouver des objets cachés, ses talents d'investigations, son analyse de la psychologie, ses compétences en médecine légale, et sa connaissance occulte.
Progresser dans l'un ou l'autre de ces talents permet là aussi de débloquer d'autres choix de dialogues, mais aussi d'ouvrir certains chemins. Développer sa force permettra par exemple de régler une énigme par la force plutôt de chercher à activer un mécanisme, et avoir un haut niveau en recherche d'objets cachés permettra de trouver certains documents invisibles autrement.
Malheureusement tout cela n'aura rarement de réel impact comme dit plus haut, et l'aspect dirigiste de l'aventure n'en sera que plus exacerbé quand on se rendra compte que tout cela menait au final au même endroit.
A noter enfin que les compétences Médecine Légale et Occultisme grimperont, elles, grâce aux documents que vous lirez et aux investigations que vous mènerez. Il ne sera donc pas possible de les booster via les points de compétences. On sent donc là une volonté de donner une certaine rejouabilité au titre, mais tout cela se révèle plus que sommaire dans l'exécution. Dommage car l'idée de base était plutôt bonne et, avec plus de liberté, on aurait eu plaisir à parcourir l'aventure à maintes reprises pour en découvrir tous les embranchements. Mais là, clairement, on a pas très envie d'y revenir, même si plusieurs fins sont disponibles.
Une atmosphère géniale... mais défigurée
S'il est une chose que Call of Cthulhu réussit encore mieux que son histoire, c'est indéniablement son ambiance. Si les décors sont au final assez peu nombreux et plutôt cloisonnés, occasionnant d'ailleurs des transitions entre les niveaux parfois assez violentes, on ne peut que reconnaître, et apprécier, le travail des développeurs sur ceux-ci. Sombres, torturés, et bien sûr brumeux, les lieux et décors du titre ont été façonnés avec soin.En plus des nombreux détails ajoutés dans les décors pour leur insufler une âme ne suffisaient pas à nous plonger dans son univers, le studio a particulièrement soigné son sound-design. Ainsi les développeurs sont parvenus à installer une ambiance encore plus oppressante en nous gratifiant d'orages menaçants ou de bruits de grincements qui résonnent derrière nous, toujours éloignés, mais jamais très loin...
Et si le sound-design s'avère des plus efficaces, les musiques sont elles aussi d'excellente facture et contribuent parfaitement à cette ambiance oppressante. Les doublages, uniquement en anglais, ne sont pas en reste et se révèlent plus que convaincants dans l'ensemble, malgré quelques acteurs moins performants.
Le problème sur Switch, c'est que tout cela est plombé par une réalisation graphique en jeu qui fait vraiment peine à voir. Et c'est encore plus choquant au sortir des cinématiques du jeu assez fines et à la mise en scène soignée.
Quand on passe de l'image du dessus à celle qui est juste en dessous de ce paragraphe, on se rend compte que porter le jeu sur la console de Nintendo a été fait au prix de nombreux sacrifices techniques, et cela a nécessairement un impact sur l'ambiance, et surtout sur l'implication du joueur.
Les petits gars de Saber Interactive ont néanmoins essayé de conserver autant que possible les jeux de lumière et autres effets visuels, mais face à la pauvreté graphique de l'ensemble, on peine parfois à ne pas ressentir un certain décalage qui finit par nous sortir du jeu. Et si cela ne suffisait pas à gâcher le plaisir, on a régulièrement droit à des temps de chargement dépassant facilement les deux minutes, de quoi complètement plomber l'immersion.
Le jeu s'en trouve donc réellement défiguré, prenant parfois des airs de jeux GameCube de début de génération mal optimisés, mais en plus desservi par une technique qui ne suit pas. Et si les temps de chargement atrocement longs ne suffisaient pas, on a droit à des mini-freezes de temps à autre, ou à des chutes de framerate.
Sur ce point cependant, il est tout de même bon de préciser que l'on sent bien que les développeurs ont cherché à ce que le soft soit aussi fluide que possible, et en dehors des moments un peu compliqués, ils y sont parvenus. Mais le prix à payer est plutôt lourd, d'autant que le jeu n'était déjà pas bien beau il y a un an sur les autres supports.
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