L'alcool, c'est le nerf de la guerre. Imaginez-vous un instant au calme, en plein cadre champêtre, entourré de roseaux et de bambous, quand soudain, une espèce d'électro aimant géant vient vous chourrer toutes vos réserves de boisson, durement accumulées à la sueur de vos mains câleuses.
Voilà à peu près le synopsis de Wooden Sen'sey, ou tout du moins ce que j'en ai compris, l'ensemble étant muet et assez expéditif. Il n'en faut en tous cas pas plus pour mettre en rogne Goro (on vous rappellera son nom à chaque mort) qui part alors en croisade pour récupérer ses précieux flacons.
I'm here to kick ass and drink Sey... And I'm all out of Sey
On ne va pas y aller par quatre chemins : avec Wooden Sen'sey, le pari d'Upper Byte, était de faire un jeu de plates-formes "à l'ancienne" particulièrement corsé, et autant dire que c'est réussi. Derrière son look plutôt mignon, le jeu s'adresse en priorité aux mordus du genre. Heureusement, les trois premiers niveaux font office de tutoriel et permettent de se faire la main en apprenant les quelques mouvements originaux de Goro. Parce qu'en plus de sauter, le vieux bougre peut aussi découper ses ennemis en rondelles, s'agripper au plafond avec ses haches-grappin et même les lancer contre le sol pour tout écraser puis rebondir encore plus haut.
Et comme de juste, la difficulté monte très vite d'un cran. Les checkpoints ont beau être nombreux et assez judicieusement placés, dans Wooden Sen'Sey la mort est monnaie courante. Les ennemis passent en l'espace de quelques minutes du stade de petites boules noires inoffensives à celui d'araignées maléfiques, de ninjas lanciers, ou de mortiers dopés aux amphets. Quand on sait que pour finir un niveau à cent pour cent il faut à la fois tous les éliminer et récupérer l'intégralité des petites gourdes de Sey éparpillées, inutile de préciser que la tâche devient vite réellement ardue.
C'est aussi, il faut bien le dire, que le côté die & retry du jeu a parfois poussé les concepteurs à disperser des pièges vraiment dégueulasses, du type de ceux qu'il est plus ou moins impossibles de prévoir avant de tomber dedans (miam les fosses à araignées qu'aucun indice visuel ne permet de repérer). Ou dans le même genre, le coup du checkpoint juste à gauche d'une hélice de moissonneuse batteuse, histoire d'arracher une pincée de vie au joueur trop pressé de repartir à l'aventure. Ajoutez à ça des actions à effectuer au gyroscope qui manquent de précision et des haches-grappins pas foutues de viser correctement, et on obtient un cocktail magique plus énervant qu’enivrant.
'Hache zdorovya
Contre toute attente, Wooden Sen'Sey ose le pari risqué d'éviter le style pixel art ; un exploit, pour une production indépendante, qu'il serait indécent de ne pas signaler. Evidemment, les moyens du studio lyonnais n'étant pas ceux de Naughty Dog, la partie technique et loin d'être parfaite : les modèles 3D ainsi qu'une grosse partie des textures sont un poil à la ramasse et lorsque les projectiles sont un peu trop nombreux à l'écran, le framerate toussote. On pardonnera, c'est sans doute ce qui arrive quand on a l'ambition de développer autre chose que des sprites tout moches, mais petit mémo pour l'avenir : créer un personnage principal à peu près aussi souple qu'une matriochka n'est
jamais une bonne idée.
De toutes façons, le titre compense allègrement grâce à des stages variés et réellement inspirés, quitte à lorgner du côté de Donkey pour les passages en ombres chinoises et Mario pour ses bateaux volants. On a connu pires références. Avec en prime quelques moments tendus mais pas trop désagréables en sous-marin, Wooden Sen'Sey frappe assez fort du côté de la diversité visuelle. Dommage que les développeurs se soient un peu laissés emportés par leur fougue : la plupart des niveaux sont vraiment trop longs. Et cette sensation de longueur est de surcroît alimentée par une grosse poignée de défauts vraiment préjudiciables.
Le plus évident est son système de combat complètement raté. La zone de dégâts des coups de hache standards étant ridiculement mince, on passe le plus clair de son temps à sauter et à faire son attaque au sol pour espérer venir à bout d'adversaires dont les hitboxes ne sont pas toujours très claires. Déjà au bout de trente minutes, ça commence à devenir très redondant, alors imaginez pendant tout le jeu. Wooden Sen'Sey fait même l'étrange choix de dispenser des passages "en arène" obligatoires, comme pour mieux faire prendre conscience aux joueurs étourdis que les combats sont vraiment mauvais. Au cas ou ils seraient passés à côté, sait-on jamais.
D'autre part, les mécanismes du jeu étant relativement limités, l'action peine à se renouveler. La difficulté augmente à chaque niveau, oui, mais on fait toujours grosso modo la même chose, et on le ressent. Fuir à cause de la lassitude ou rage qui est d'ailleurs rudement puni : le jeu ne garde pas en mémoire le compteur de vies et vous repartirez donc avec un total de 4 vies même si vous en aviez collectées une quinzaine auparavant. C'est dur mais ce n'est encore rien par rapport à ce que vous fera subir la bande-son qui est tout simplement affreuse. Devoir recommencer en boucle des portions de niveaux pour réussir, c'est une chose ; le faire sur des compositions aussi désagréables, là ça tiendrait presque de la torture.
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