Test de Athenian Rhapsody : le RPG rétro WTF
Athenian Rhapsody c’est l’expérience d’un RPG à l’ancienne mais totalement barré osant casser les codes. À réserver aux amateurs (anglophones) avertis uniquement !
TestUn univers déjanté au pays des monstres
Athenian Rhapsody c’est un peu la rencontre entre Alice au pays des merveilles et Beetlejuice, soit le parcours initiatique de notre personnage humain un peu naïf, un peu muet – on connaît la formule éculée dans plus d’un jeu vidéo – qui découvre un monde obéissant à ses propres règles ou en l’occurrence ici ses non règles !En effet si tout semble conventionnel, en réalité rien ne l’est. Le jeu entend marcher dans les pas des jeux de rôle d’antan, avec des graphismes honorant la mémoire de la SNES ou de la Gameboy, Pokémon en premier lieu, dans un découpage du monde vu du dessus et un déplacement entre des cases, selon la formule consacrée.
En revanche tout se chamboule avec l’arrivée des personnages qui sont tous la conjugaison de créatures plus loufoques les unes que les autres. Entre les alliés qui se mettent subitement à vous attaquer, les ennemis qui s’avèrent finalement aussi doux que des agneaux, le joueur perd tout ses repères et c’est sûrement là l’atout principal du jeu.
Impossible de résumer ici l’histoire du jeu – c’est littéralement impossible – surtout fondée sur l’exploration et la découverte de nouveaux territoires par notre personnage naïf, crédule et manipulable à souhait, qui se fait balader par à peu près tous les protagonistes qu’il croise au sein du monde d’Athenes. Gardez à l’esprit que le jeu entend surtout se moquer des codes des RPG traditionnels et proposer au joueur des moments comiques, avec des situations loufoques, tant dans les dialogues que dans le gameplay qui détournent des situations traditionnelles.
Le personnage timide et réservé s’avère ainsi devenir un ennemi redoutable dès qu’il entre dans une colère terrible déclenchée par une broutille ou encore, lors d’un combat, le jeu peut décider qu’arrivé à un certain seuil, l’ennemi met fin à l’affrontement de manière arbitraire et pour des raisons qui lui sont propres.
Le gameplay au service de la folie ou la folie au service du gameplay
Alors que les déplacements dans le jeu rappellent des souvenirs nombreux d’anciens RPG traditionnels, les combats sont sûrement ce qui permet au jeu de se démarquer de modèles canoniques et de se rapprocher d’autres classiques des jeux indépendants, au premier rang desquels le jeu Undertale, sorti en 2018 sur Nintendo Switch.En effet en bon RPG, le jeu adopte un système d’affrontements au tour par tour, avec des points de vie, des points de pouvoir et un sac avec des équipements. Athenian Rhapsody retient la formule corsée du RPG car ici pas de droit à l’échec dans un jeu qui s’avère mine de rien n’être pas si facile que cela, puisque perdre un combat revient au Game Over et ramène le joueur directement au dernier point de sauvegarde.
La structure des combats adopte une subtilité propre au jeu qui rappelle celle d’Undertale. Si on l’on peut en effet combattre les ennemis classiquement afin de réduire leur barre de vie et ainsi gagner de traditionnels points d’expérience en plus d’une somme d’argent, une autre voie est possible. Ainsi si l’approche belliqueuse vous semble trop abrupte ou bien que vous êtes trop lâche pour vous lancer dans l’affrontement à corps perdu face à des ennemis souvent terriblement bien dotés en points de vie, il est possible de tenter de nouer une amitié durable avec ces créatures toutes plus loufoques les unes que les autres. Les graphismes des personnages au caractère bien trempé sont souvent des mélanges, à la fois de gif, de parties dessinées ou de stickers sans queue ni tête, ou plutôt même avec plusieurs têtes ou plusieurs queues !
En combat cette voie de la paix et de l’amitié fonctionne sur le principe de mini questionnaires qui proposent de choisir la meilleure ligne de dialogue afin de séduire l’adversaire et peu à peu gagner sa confiance. Ce faisant une barre rose d’amitié se remplit progressivement au-dessus des points de vie de l’ennemi, jusqu’à être pleine et que l’option « Devenir amis » devienne sélectionnable. Autant vous dire que cette solution pacifique originale est clairement le chemin à suivre pour s’éviter bien des soucis et un levelling fastidieux compte tenu de l’endurance très médiocre de notre personnage. Celui-ci n’est en effet capable de soutenir qu’avec médiocrité les attaques et d’en porter avec une efficacité toute relative. Libre à vous de tenter l’affrontement si vous aimez les défis ardus.
Heureusement le fait de choisir les options de discussions avec l’adversaire permettent de remonter notre total de points de pouvoir qui sont fort utiles pour utiliser quelques capacités spéciales dont une permettant de se soigner par exemple. Il est également possible de compter sur notre allié qui nous suit la plupart du temps et qui s’avère être un renfort de premier choix pour venir à bout par la force des ennemis croisés. C’est toutefois soit à lui soit à nous d’entrer en action et jamais aux deux. Cette formule du compagnonnage un peu étrange éloigne le jeu des RPG plus classiques où l’on est en général à la tête d’une équipe. Le revers à la formule choisie ici est que l’on se sent un peu moins investi avec le partenaire qui nous suit.
Notez aussi que grâce à quelques marchands croisés en chemin ou encore via des coffres égarés ici ou là, nous pouvons compter sur un petit arsenal de soins et autres bonus pendant les combats. Ce n’est pas la panacée mais ces outils permettent de tenir a priori le temps nécessaire pour survivre, même si le risque est souvent grand de ne pas résister en cas d’erreurs répétées ou d’un manque d’adresse.
Une expérience intense, marquante mais clivante
Jouer à Athenian Rhapsody ne laisse que peu indifférent, pour peu que l’on plonge dans les dialogues très nombreux des personnages du jeu. Un niveau d’anglais plus que correct est impératif pour ne pas subir ce verbiage intempestif et ne pas se sentir exclu des échanges et de l’ironie omniprésente dans l’histoire, surtout que l’on sent régulièrement que notre personnage est clairement considéré comme un bleuet dont le reste du monde semble se payer la tête.Si toutefois le jeu n’était que cela et pouvait s’apprécier en tant qu’expérience loufoque parfaitement accessible, tout ne serait finalement qu’une histoire de goût personnel et de ressenti subjectif. Néanmoins le titre prend le parti de coupler à cela une exigence d’adresse et d’habileté fréquentes, en particulier dans les combats. En effet pour chaque attaque ennemie ou coup que l’on souhaite porter, le titre met le joueur sous pression avec une sorte de micro jeu. Si porter une attaque est généralement simplissime puisqu’il s’agit de cliquer au bon moment quand une jauge se remplit, en revanche éviter l’attaque adverse est bien plus tendu. Il peut s’agir d’éviter des projectiles qui tombent du ciel, de faire face à des attaques provenant de toute part ou de soi-même devoir attaquer des cibles mouvantes, voire encore plus original mais on vous laisse le découvrir.
Nous avons souvent été surpris par la rapidité de ces attaques et seule la répétition et l’entraînement permettent d’améliorer son skill et ainsi devenir une parfaite anguille à même d’esquiver tous les coups portés. Seulement est-ce réellement l’ambition que devrait porter un tel jeu ? Le titre repose en effet surtout sur sa dimension narrative et sur la folie de son univers. Autrement dit on ne joue pas à Athenian Rhapsody pour se mesurer à des ennemis dantesques et élaborer des techniques fines d’affrontement. On choisit ce jeu pour son écriture et s’essayer à une expérience originale et créative d’écriture, pour peu que l’on soit un adepte du WTF bien senti. Certes le jeu inclut une option chill mode qui rend votre personnage moins sensible aux attaques mais pas de quoi atténuer la difficulté parfois mal dosée du jeu.
Probablement faut-il y voir une manière pour le titre de renforcer chez le joueur son implication en jeu et donc accroître l’investissement qu’il met dans sa progression. Certains aimeront encore plus, d’autres détesteront encore plus rapidement. Vous voilà bien avancés. Reste que le jeu propose son lot de surprises et de rebondissements à travers des rencontres inattendues qui donnent lieu à des phases de gameplay originales et plaisantes mais sans pour autant révolutionner le genre.
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