De l’opus original au portage Wii
Il convient avant toute chose de rappeler qu’Okami n’est pas un jeu créé spécialement pour tourner sur la dernière console de salon Nintendo. A l’origine, il s‘agissait au contraire d’une exclusivité PS2. Malheureusement pour les studios de développement, Okami n’a pas su faire l’unanimité auprès de ses acheteurs, la faute à une formule extrêmement bouleversante dans le milieu vidéo-ludique. Les paris osés sont souvent autant de portes ouvertes à un succès démesuré, mais ils peuvent être la raison suffisante d’un échec. Okami appartient à la seconde alternative et n’a pas réussi à faire valoir ses propres qualités, faute d’une promotion trop discrète et du manque certain d’un public adapté.Les faits datent de Février 2007 en France, date à laquelle de nombreux joueurs découvraient la Wii, console semblait-il novatrice et terriblement révolutionnaire dans ses concepts. L’équipe de développement a choisi de laisser une deuxième chance à Okami, en s’apercevant que le titre déchu correspondait tout à fait à la philosophie de la console blanche de Nintendo. C’est un premier paradoxe, dans la mesure où ce chef d’œuvre vidéo-ludique n’a trouvé d’écho que sur une console à la base concurrente. De là est née l’idée de ce portage, avec cette fois-ci de nouveaux objectifs : faire découvrir un titre tapi dans l’ombre de l’actualité, et lui offrir toutes les chances d’acquérir la renommée escomptée.
La proéminence de la nature
Si l’on devait placer Okami dans une optique particulière, il s’agirait incontestablement de celle de la Nature. Le titre s’affiche comme un retour aux sources dans son intrigue mais aussi dans sa forme. Une large part des graphismes s’attache à faire ressortir une sensation d‘harmonie de nature, de calme et de sérénité, tandis que l’ensemble des populations se montre d’une grande proximité avec leur environnement. On discerne cet attachement grâce à la présence d’une pléthore d’actions à effectuer sur cette nature, comme les missions de floraison, ou d’éclosion par le biais d’une danse rituelle. En dehors de la capitale Seian, les villages que vous traversez ne manifestent aucun désir de destruction naturelle, ni de modernisation prématurée.Ces peuplades vivent en accord avec les règles de la terre. Et comme pour mieux symboliser cette importance de la nature, le héros a été matérialisé sous une forme animale : celle du loup. Ou plutôt de la louve. Amaterasu est dans la mythologie la déesse du soleil, une sorte de divinité principale en laquelle on peut retrouver le Ré égyptien ou la célèbre image de la Mère Nature – grâce au genre féminin de cette entité. Sa mission est de redonner vie aux esprits de la nature, répondant au nom de Kami. Il y a en tout treize divinité mineures à éveiller de leur sommeil afin d’acquérir de nouveaux pouvoirs.
Un titre profondément ancré dans sa tradition
Si vous êtes une âme rêvant d’escapade et de dépaysement, Okami semble à même de satisfaire cette double attente. Car ce qui se révèle pour certains être la faiblesse du titre, à savoir son goût prononcé d’exotisme, est en fait sa plus grande force. On se retrouve plongé dans un maelstrom de fraîcheur dès les premiers instants de contact avec le jeu. L’ouverture culturelle se fait sentir avec poigne dans l’introduction magistrale du jeu, en composant une légende inspirée des mythes japonais ancestraux. Parmi ces diverses représentations légendaires apparaissent de grandes figures populaires, telles que Shiranui le salvateur, le dragon malfaisant Orochi. D’entrée, ces noms évoqueront nombre de rappels pour les passionnés de cette culture orientale. Et force est de constater que les références traditionnelles ne manquent pas dans l’intrigue principale. Le scénario d’Okami est truffé de clins d’œil plus ou moins explicites à l’univers japonais, qu’il est bien difficile de décrypter pour nous, pauvres européens incultes que nous sommes. Une courte section de la notice de jeu a cependant été réservée à des explications relatives aux scènes les plus étranges de l’opus.Les initiés au célèbre manga Naruto trouveront eux aussi leur bonheur dans nombre de scènes et de personnages clef de l’aventure. Pour ne pas nous enfoncer dans un contenu qui gâcherait la découverte, nous ajouterons simplement que des éléments se rattachent fortement à l’entité d’Orochimaru, ou celle du renard à neuf queues Kyubi par exemple… Ce panel référentiel est un perpétuel plaisir d’exploitation, de reconnaissance et de liens.
Dans une optique plus rationnelle, les développeurs se sont attachés consciencieusement à dépeindre l’univers d’un Japon médiéval dans ses moindres détails. Les rites de la tradition font partie intégrante de l’opus, conférant à Okami un caractère documentaire. C’est un tableau fascinant où fourmillent ces brèves scènes de la vie quotidienne. De la fabrication du saké à la confection des fameux gâteaux de fleurs de cerisier, la liste des plats et des coutumes ravira les amateurs de cette culture si lointaine.
Une estampe en trois dimensions
Lorsque l’on explique qu’Okami s’inscrit dans le prolongement des traditions du Japon médiéval, il faut également préciser que si les mœurs et les coutumes de l’époque sont respectées, le graphisme a lui aussi été l’objet d’une recherche spécifique. Le rendu visuel se rapproche des techniques d’estampes japonaises ancestrales. Mais comment les concepteurs ont-ils réussi cette prouesse d’allier un art purement bidimensionnel à une carte de jeu modélisée selon les trois dimensions ?Rappelons que le style de ces peintures anciennes se veut sobre et terne, et que la plupart des motifs sont cerclés d’un sillon d’encre de chine noire. Il paraît à première vue très difficile de transposer une telle conception esthétique sur un support virtuel efficace. Il ne faut pas nier que nos concepteurs ont effectué là un vrai travail de génie et d’artiste.
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